Merci Madame la Maire,
Mes chers collègues,
J’ai l’honneur de prendre la parole au nom de mon groupe Modem et Indépendants pour la dénomination du parvis du tribunal de Paris qui s’appellera désormais “parvis Robert Badinter”.
“Grandeur de la France, noblesse de la gauche, humanisme de l’autre homme, et esprit du judaïsme”. Bernard-Henri Lévy écrivait ses quelques mots en hommage à Robert Badinter qui venait de décéder. C’était le 9 février 2024.
En effet, tout au long de sa vie Monsieur Badinter a participé de la grandeur de la France à travers son engagement pour une justice humaine, même s’il avait plusieurs autres centres d’intérêt et plusieurs activités. Professeur de droit, il a marqué notre pays par bien des facettes de son action, mais il était surtout l’artisan de progrès sensible accompli dans la défense de la dignité de la personne humaine et de la victoire qu’a constitué l’abolition de la peine de mort vous l’avez rappelé Madame la Maire.
Le 17 septembre 1981, près de deux siècles s’étaient écoulés depuis la première fois où Claude Le Peletier de Saint-Fargeau demandait à l’Assemblée constituante, l’abolition de la peine capitale.
En effet, la France a été, et elle est toujours grande, non seulement par sa puissance mais au-delà de sa puissance par l’engagement d’hommes et de femmes de génie par l’éclat des idées des causes, de la générosité et du sens de la solidarité. C’est de France de Paris que se sont toujours levées les plus grandes voix, celles qui ont raisonné le plus haut et le plus loin dans la conscience humaine.
Après Le Peletier de Saint-Fargeau il y a eu Lamartine, Jaurès, Aristide Briand, Victor Hugo sans oublier Camus mais aussi Gambetta, Clémenceau et bien d’autres très nombreux, tous ont soutenu la cause de l’abolition.
Mais notre pays a mis deux siècles à légiférer grâce et par la volonté de Robert Badinter, cet avocat des causes justes qui s’inscrivait dans la lignée des grands hommes et des grandes femmes qui forment notre conscience nationale.
Lui qui disait devant la représentation nationale au Palais Bourbon que désormais la justice française ne serait plus une justice qui tue. Qu’il n’y aurait plus pour notre honte commune d’exécution furtive à l’aube sous le devoir dans les prisons françaises.
Il disait aussi qu’à cet instant plus qu’à aucun autre il avait le sentiment d’assumer son ministère au sens ancien, au sens noble, le plus noble qui soit c’est-à-dire au sens de service.
Monsieur Badinter a vécu l’engagement politique, l’exercice du pouvoir, les subtilités du contrôle de constitutionnalité, mais aussi la réflexion et l’éloquence nécessaire pour les mots et les idées justes.
Il a promu la création de la Cour pénale internationale. Il a participé de la dépénalisation de l’homosexualité. Il a écrit des livres, des essais, des articles, une pièce de théâtre, un livret d’opéra, il a participé à nombre de colloques et de conférences.
Intellectuel engagé dans les débats de son temps, conscience morale aux yeux de ses contemporains, c’était avant tout un homme de droit et de justice qui portait la prescription biblique : “la justice tu chercheras ardemment”. Enfant de déporté, il a connu très tôt la blessure de ne plus revoir ceux qu’il aimait.
L’héritage moral dont il était dépositaire lui donnera aussi sans doute cette volonté de justice et non de vengeance. De la faculté de Besançon au haut-lieu du pouvoir politique au Gouvernement, au Parlement, au Conseil constitutionnel, il aura laissé dans les lois comme dans la mémoire de ceux qui l’ont approché, la trace d’un homme infatigable, rigoureux vivant et agissant pour la justice et le droit.
Alors Madame la Maire, mes chers collègues, ce parvis Robert Badinter que cette délibération que nous adopterons, je l’espère à l’unanimité, rappellera pour toujours le juste à l’humanité qu’il était, les valeurs qu’il a incarné les luttes pour la justice qu’il l’a symbolisé lui fils de Simon, déporté et de Charlotte lui époux d’Élisabeth, une grande dame à qui nous souhaitons aussi présenter nos respectueux hommages.
Je vous remercie.