Madame la Maire,
En dépit des promesses que vous aviez faites lors de la campagne de 2020 et renouvelées il y 8 mois à peine, vous avez donc décidé d’augmenter la taxe foncière de plus de 50% pour boucler votre budget. Vous alourdissez ainsi la fiscalité pesant sur les propriétaires parisiens pour dégager plus de 500 millions d’euros, et retrouver ainsi des marges de manœuvre dont vous manquiez cruellement en raison d’une gestion à courte vue que nous n’avons eu de cesse de dénoncer.
Pour renier votre promesse de campagne et vous venez de le refaire à l’instant, vous avancez plusieurs arguments.
D’abord ce serait une obligation inattendue liée à la conjoncture. Non, c’est une décision inéluctable de l’impasse budgétaire liée à votre incapacité à faire les réformes structurelles.
La vérité impose de dire que la trajectoire budgétaire empruntée depuis 2014 : dépenses non maîtrisées, recours massif à l’emprunt, artifices comptables pour boucler chaque année votre budget, dénoncés, maintes fois, ne laissait d’autres choix que d’augmenter les impôts locaux, après avoir augmenté tout le reste lors de votre premier mandat.
Rappelons que les Parisiens et les visiteurs ont déjà été mis à contribution sur à peu près tout ce qu’il était possible de faire notamment : le stationnement, la taxe sur les ordures ménagères, l’augmentation de la taxe sur les résidences secondaires, la taxe de séjour, la taxe sur les logements vacants.
En réalité, les indicateurs budgétaires sont depuis longtemps extrêmement inquiétants : explosion de la dette, taux de désendettement au-delà du seuil d’alerte – 24 ans pour 2021 – et une épargne brute négative au 31 juillet 2022.
Des indicateurs profondément dégradés, et ce malgré la spéculo-dépendance de la Ville, qui depuis 2014 a perçu plus de 11 milliards d’euros grâce au marché immobilier.
Non, madame la Maire, cette décision d’augmenter la taxe foncière n’est que la conséquence de vos choix budgétaires, en rien une réponse à une situation subie.
Deuxième argument : vous dénoncez le traitement dont pâtirait Paris. En réalité, c’est justement d’un traitement différencié que vous souhaiteriez bénéficier, comme si vous n’aviez, plus que toute autre ville, de multiples leviers à votre disposition pour gérer votre budget.
Outre les mesures de soutien conjoncturel, les recettes de fonctionnement de la Ville ont augmenté, malgré les réformes de la fiscalité directe locale qui ont été totalement compensées. Mieux, en tenant compte de l’ensemble des éléments de compensation, les produits de la fiscalité locale de 2019 à 2022 ont même augmenté de près de 4%.
Troisième argument : vous expliquez l’augmentation de la taxe foncière par la nécessité de maintenir, je cite, “un haut niveau de service pour les Parisiens”. Le haut niveau de service n’est sûrement pas dans l’entretien de l’espace public et les Parisiens le cherchent encore du côté de l’adaptation de la ville au changement climatique.
Alors si la situation a changé, ce n’est pas sous l’effet des crises successives, qui ont évidemment un impact et personne ne le nie, mais les aides directes aux Parisiens, aux professionnels, le plan de relance, le fonds vert, le filet de sécurité énergie ont permis de l’amoindrir, quoi que vous en disiez. Ce qui a changé, c’est plutôt la fermeté du gouvernement sur les loyers capitalisés et l’augmentation des taux d’intérêt qui renchérit le coût du crédit.
L’augmentation de la taxe foncière vous permet de boucler le budget et de retrouver des marges de manœuvre. Des marges de manœuvre artificielles au regard des défis qui sont devant nous et du niveau de la dette. Autant d’inquiétudes, auxquelles le DOB ne répond pas.
Les difficultés liées au bouclage de ce budget, en l’absence de la manne des loyers capitalisés vous ont permis de parler, pour la première fois, d’économies. Rapidement abandonnées. Nous vous en proposons depuis des années. Cela nécessite du courage politique : maîtrise de la masse salariale, réorganisation du travail des agents et par-dessus tout, évaluation de toutes les dépenses à l’aune de leurs bénéfices pour les Parisiens, et uniquement des Parisiens. Par exemple, en renforçant l’attractivité de la police municipale grâce à un accès prioritaire au logement social comme notre vœu le propose.
Avec la manne de la taxe foncière, vous avez abandonné la question des économies, qui est pourtant une impérieuse nécessité. Au regard des fondamentaux budgétaires de la Ville qui ne sont pas sains, le budget de la Ville demeure sous perfusion immobilière alors qu’un ralentissement des transactions immobilières s’annonce.
Et parce qu’il faut trouver un chemin pour désendetter la ville. A la fin de l’année, l’endettement dépassera les 8 milliards d’euros. En un an, le niveau d’endettement par habitant aura augmenté de de 300 euros. Le remboursement en capital des emprunts et la charge financière en 2021 représentent 70% de l’augmentation de la taxe foncière.
L’annonce d’une augmentation de la taxe foncière aura au moins permis de ressouder votre majorité. Mais sans évaluation des dépenses, sans réel plan d’économie, sans Plan d’investissement de la mandature, cette manne ne fera que réamorcer une dynamique inflationniste en matière de dépenses et continuera de servir une politique budgétaire erratique sur le dos des Parisiens.
Je vous remercie.