Madame la Maire, merci pour ces mots.
En tant qu’élu du 5e arrondissement et représentant pour l’occasion le groupe centriste, je ne peux qu’évidemment m’associer à vos paroles et j’en suis sûr, aux pensées de tous nos collègues de tous les bancs.
Il y a un an, Monsieur le Président de la République a décoré Samuel Paty à titre posthume, chevalier de la Légion d’honneur et des palmes académiques. Depuis le consensus national ne s’est pas fendu, il est toujours aussi conséquent et lorsque son nom sera apposé à cet espace vert, entre le musée Cluny et la Sorbonne, je suis sûr que les nombreux Parisiens qui seront présents partageront également nos vœux et nos prières en faveur de la mémoire et en hommage à ce héros de la République.
Alors nous laisserons évidemment de côté la politique puisque, quels que soient nos désaccords ou accords – et Dieu sait s’ils sont parfois nombreux et importants – ce qui compte, c’est le destin individuel et le modèle, que représente le parcours de cette personnalité exemplaire.
Nous laisserons également de côté la procédure judiciaire qui se poursuit, puisque je rappelle qu’environ une quinzaine de personnes sont poursuivies à des titres divers pour complicité. Je forme simplement le vœu, en tant qu’élu municipal, que les décisions de justice qui seront rendues recueilleront le même accueil consensuel de notre société.
Après, beaucoup de choses peuvent être dites sur le destin tragique de Samuel Paty, des propos politiques, des propos philosophiques, et vous avez cité Montaigne, vous avez cité la République et la laïcité, évidemment. Il est inutile que je poursuive sur ce sillon, il est conséquent et vous l’avez très bien fait.
Simplement peut être un mot, une observation sur le destin individuel puisqu’il est marqué à la fois par son exemplarité, au sens des canons collectifs et sa solitude. Une solitude dans la souffrance et finissant par le sacrifice suprême, comme d’autres Français dans le passé, et aujourd’hui aussi sur d’autres théâtres. Et c’est peut-être ce destin sacrificiel qui nous impressionne le plus, nous autres élus. Puisque nous partageons avec lui l’engagement, mais nous ne courons pas les mêmes risques. Alors nous vouons un culte à l’engagement politique et citoyen et toute personne – quelle que soit sa profession – qui nous semble le faire avec un tel sens du sacrifice et en allant aussi loin, ne peut qu’intimer notre plus vive admiration.
Vous avez cité Montaigne.
Permettez-moi de citer Benjamin Constant.
Benjamin Constant qui était un ami de la liberté, qui lui-même a affronté dans notre pays la folie des hommes, les massacres et les tueries. Benjamin Constant dans un autre hommage
a eu ces paroles qui me paraissent peut-être s’appliquer à ce destin individuel.
“Plus on a de facultés brillantes, plus il faut savoir les dompter ; que lorsqu’on offre aux vents impétueux de si vastes voiles, il ne faut pas tenir un gouvernail faible d’une main tremblante ; que plus les dons de la nature sont nombreux, éclatants et diversifiés, plus il faut marcher au milieu des hommes avec défiance et avec réserve ; qu’entre le génie révolté et la société sourde et sévère, la lutte n’est pas égale, et que pour les âmes profondes, les caractères fiers et sensibles, les imaginations ardentes, les esprits étendus, trois choses sont nécessaires, sous peine de voir le malheur tomber sur eux, savoir vivre seul, savoir souffrir ; savoir mépriser.”
Face à la mort, Samuel Paty, malheureusement, malgré l’amour des siens, sa famille, ses amis, nous en avons parlé, était seul. Il a souffert pour lui, mais aussi pour la République. Mais aujourd’hui, il est aimé et admiré de tous. Et s’il a méprisé la peur, le conformisme et les menaces sur les réseaux sociaux ou sur d’autres supports, aujourd’hui il n’est plus seul.
Il ne souffre plus et son mépris, pour nous, est un modèle et un exemple.
Voilà les quelques mots, Madame la Maire, que je voulais vous dire au nom des habitants du 5e arrondissement.