Madame la Maire,
Mes chers collègues,
Avec vous, la présentation du budget de la ville s’apparente au film « un jour sans fin ». Toujours les mêmes antiennes, une bonne dose de mauvaise foi, et chaque année ce sentiment que la trajectoire budgétaire ne peut pas être plus inquiétante.
Et en réalité, si, comme vos projets le démontrent ce matin.
Même si la trajectoire de la DGF pour Paris est connue depuis maintenant 10 années, vous continuez à dénoncer sa disparition. Alors on peut, ou non, la regretter, mais c’est une donnée qui est connue depuis une décennie, largement le temps d’adapter son budget en fonction.
A la critique de la disparition de la DGF, vous ajoutez désormais la suppression de la taxe d’habitation, compensée pourtant à l’euro près, mais également la CVAE, non seulement compensée, mais dynamisée par l’inflation. Les dotations, compensations, transferts en provenance de l’État s’élèvent pourtant à plus de 3,6 milliards d’euros. On a vu plus explicite comme désengagement.
La complainte, également habituelle, liée à l’augmentation de la péréquation. Alors une singularité pour nous de voir chaque année une majorité de gauche dénoncer la nécessaire solidarité entre les territoires, un “racket” nous a exprimé le président du groupe communiste ce matin, tout se perd.
Alors cette mauvaise foi c’est demander l’augmentation de la taxe sur les palaces mais la regretter quand c’est pour financer les transports.
A vous entendre, la situation serait donc grave. Pourtant, le budget de fonctionnement continue d’augmenter, de 225 millions d’euros. Tout comme les dépenses de fonctionnement, de 531 millions d’euros.
Car plutôt que de revoir les dépenses de la ville, vous avez mis à contribution les Parisiens, à travers l’augmentation de près de 62% de la taxe foncière, et l’augmentation des tarifs, mais également les générations futures en creusant la dette.
Ce budget, traduit le fait que nous sommes arrivés au bout d’un modèle. Celui reposant sur des recettes caractérisées par leur instabilité ou le fait qu’elles devaient se tarir.
Le retournement du marché immobilier, pourtant inscrit depuis des mois, n’a pas été anticipé par la ville. Depuis 10 ans, la hausse continue des dépenses de Paris s’est appuyée sur la spéculo dépendance de la ville et l’augmentation, le doublement depuis 2013 des DMTO. Mais cette recette par nature soumise aux fluctuations conjoncturelles s’est affaissée depuis un an. Malgré l’évidence, malgré l’alerte que j’avais émise dès le débat d’orientation budgétaire en novembre 2022, réitérée lors du débat sur le budget primitif 2023, réitérée lors du débat du budget supplémentaire 2023, vous avez refusé de revoir à la baisse le montant des DMTO qui s’élèvera à 300 millions de moins que les prévisions du budget primitif et dont on attend toujours la manière dont ce trou sera comblé sur le budget 2023.
De quoi se poser la question de la sincérité des recettes.
Une nouvelle fois, vous faites preuve d’optimisme en tablant sur des DMTO à 1 500 millions d’euros pour 2024, alors même que l’effet prix et l’effet volume devraient se poursuivre ces prochains mois, selon la Chambre des notaires. Acceptez enfin notre proposition de caper les DMTO et de consacrer l’éventuel surplus au désendettement. 2 avantages : ne plus fonder un budget sur une recette volatile et travailler au désendettement de la ville.
La cession des bijoux de famille a longtemps permis de boucler le budget de la ville. Mais, les cessions immobilières se tarissent. Cette année, elles ne s’élèveront qu’à 110 millions d’euros, contre 307 en 2018.
Et puis les conventionnements : comme les cessions immobilières, le nombre de conventionnements diminue et l’inscription en recettes d’investissement baisse.
Ces différentes impasses uniquement dûe à la Ville, engendrent une trajectoire budgétaire particulièrement inquiétantes se traduisant par une chute de l’épargne brute de 306 millions d’euros pour s’établir à un plancher bas, jamais vu depuis le covid, de 569 millions d’euros et une augmentation de la durée de désendettement de la ville, à plus de 15 ans.
L’accélération de la dette parisienne avec une autorisation d’emprunt en 2024 fixée à 954 millions d’euros. Une dette fin 2024 officielle de 8,7 milliards d’euros. Et selon vos propres prévisions, sans compter donc la dette cachée, la dette de notre collectivité atteindra 9, 9 milliards d’euros d’ici fin 2026, avec des taux d’intérêt aujourd’hui bien plus élevés que par le passé qui engendrent l’augmentation des intérêts et de la charge de la dette qui dépasse le demi milliard d’euros et obère durablement une partie chaque année plus importante du budget de notre collectivité.
Car il n’y a toujours aucun changement de paradigme du côté des dépenses. Et ce n’est pas faute d’avoir fait des propositions que nous réitérons encore cette année : où est le plan d’économies annoncé, dont nous n’avons jamais vu la couleur ? Où est le plan de limitation des frais de fonctionnement de la ville ? Sur un sujet, certes mineur mais pas anecdotique, un an après que vous ayez fait la promesse d’ouvrir la réflexion sur les jetons de présence en réponse à mes demandes renouvelées, la réunion n’a même pas eu lieu ! S’il faut un an pour engager une réflexion sur une diminution des dépenses, on comprend mieux pourquoi la ville n’arrive pas à baisser ses dépenses. D’où le redépôt de notre vœu, puisque rien n’a avancé.
Pour nous, chaque dépense de la ville doit servir les intérêts des Parisiens. C’est à travers cette unique grille de lecture que chaque dépense doit être étudiée. Plutôt que de travailler à cela, on assiste une nouvelle fois à l’augmentation des dépenses :
Les charges de personnel augmentent de 159 millions d’euros, avec la création de 645 postes dont seulement la moitié est liée à la police municipale.
Les dépenses de gestion progressent de 304 millions d’euros, avec notamment une explosion des dépenses informatiques de 53 millions d’euros et une augmentation, encore, du budget communication.
Et puis des bizarreries.
Vous considérez qu’il faut construire 60 cours oasis mais le budget consacré s’élève à 6,5 millions d’euros et on voit mal comment, au regard du prix d’une cours oasis, cet objectif sera atteint.
Dans les dépenses thématiques, je voudrais souligner une prise de conscience, certes tardive et insuffisante, mais néanmoins, de la ville, qui consent enfin à augmenter le budget de l’entretien des espaces verts de 2 millions, à 3 millions ; mais également de la voirie, de 5 millions. C’est évidemment bien insuffisant mais cela met un terme à la baisse continue des budgets consacrés à l’entretien de l’espace public. Insuffisant comme le sont les 600 000 euros consacrés au plan volet censé équiper des volets des logements gérés par les bailleurs sociaux et les équipements publics.
Notre inquiétude est très forte. On ne peut se résoudre à voir augmenter les impôts des Parisiens et augmenter la dette de la ville. Le constat est posé, les propositions sont avancées.
A vous de vous en saisir.
Je vous remercie.