Madame la Maire, mes chers collègues,

Votre plan que vous qualifiez d’historique ne peut être que décevant par son manque d’ambition.

Exercice certes peu aisé compte tenu des incertitudes, mais dont la difficulté est exacerbée par la manière dont la crise a été gérée, alors que la démocratie parisienne a brutalement été mise à l’arrêt. Or, rien n’imposait son confinement. Pour aller plus loin, la situation à laquelle nous sommes confrontés imposait, au contraire, de faire vivre la démocratie, qu’elle soit représentative ou participative.

Sur le plan : manque significativement d’ambition

  • Sur le commerce

Les annonces d’exonération des loyers, taxes et redevances venant en aide au tissu commercial vont bien sûr dans le bon sens. Mais au regard de la situation économique très fortement dégradée des entreprises et commerces parisiens, nous attendions bien davantage et notamment des engagements sur le sujet du soutien à la trésorerie des TPE/PME, à travers le raccourcissement des délais de paiement à l’égard de vos partenaires ou la suppression des pénalités de retard.

  • Sur la culture

Il en est de même sur la culture.

Comme le souligne Béatrice Lecouturier, si des mesures financières sont nécessaires, elles ne sont pas l’alpha et l’omega, particulièrement lorsqu’elles sont insuffisantes.

Il nous faut réinventer les modes d’accès à la culture dont nous voyons toutes les limites à ce jour, et ne plus raisonner sur les mêmes schémas qui nous ont guidés jusqu’à présent.

A ce manque d’ambition s’ajoute un problème de temporalité, de positionnement et de priorisation. Ce plan :  

  • Ne prend pas suffisamment en compte les enseignements des premiers mois ;
  • Et il manque l’occasion d’affirmer un positionnement dès aujourd’hui pour préparer l’avenir.

1e remarque :

1-Des changements de paradigmes nécessaires

La crise impose la concertation

Avec les maires d’arrondissement, qui sont en première ligne auprès de leurs concitoyens.

Avec la métropole et la région. Notamment sur la dimension développement économique et touristique. A ce propos, vous évoquez l’absence de tourisme à Paris cet été. Nous pensons au contraire qu’il faut veiller à proposer aux Français souhaitant profiter des vacances pour visiter la capitale de le faire différemment. Par exemple, en valorisant les quartiers parisiens qui regorgent de richesses, pour développer une autre forme de tourisme, plus respectueuse de la ville et des Parisiens.

La crise impose de nouveaux schémas de pensée

A situation exceptionnelle, réponse exceptionnelle. Il est urgent de sortir des cadres préétablis.

Pour soutenir la réouverture des écoles, et permettre à davantage d’enfants d’être accueillis ce qui est indispensable, autorisons-nous à utiliser d’autres locaux : les équipements sportifs qui n’ont pas rouverts, les parcs et jardins, etc.

Pour la culture aussi, il y a des choses à inventer avant même la réouverture des équipements, notamment à travers la poursuite de la numérisation des œuvres et l’équipement informatique en tablettes ou en ordinateurs pour favoriser l’accès aux plus grands nombre.

2-Des leviers non utilisés Nécessité fait loi et doit pallier les errements d’hier

Nécessité fait loi et doit pallier les errements d’hier

Inciter les Parisiens et les Franciliens à se déplacer à vélo pour contribuer à désaturer l’espace public est un objectif partagé par le gouvernement et la région. Et une priorité pour nous qui n’avons eu de cesse de demander un meilleur partage de l’espace public.

Mais il vous revient de remplir ses obligations. Car pour permettre aux Parisiens d’emprunter un vélo, encore faut-il que le système fonctionne ! Comment se satisfaire en effet des annonces de Smovengo affirmant qu’il va peut-être s’approcher du respect du contrat 2 ans ½ après ? La Ville, via le SVAM, doit enfin imposer à l’opérateur de respecter ses engagements.

Nécessité fait loi et doit pallier les errements d’hier

C’est aussi la raison de notre vœu :

En 2014, nous faisions adopter le dispositif des logements tremplin pour permettre aux internes d’accéder à un logement à loyer modéré, en échange d’un engagement d’exercer en secteur 1.

En 2019, nous demandions à élargir ce dispositif à tous les professionnels de santé, considérant que les personnels essentiels à notre santé devaient pouvoir, s’ils le souhaitaient, habiter à proximité de leur lieu de travail.

Alors que notre vœu de 2014 avait été adopté, il n’a jamais été mis en oeuvre, et vous nous expliquiez l’an dernier qu’il n’avait pas lieu d’être. La crise a démontré s’il en était besoin combien ce n’était pas le cas. Le privé s’étant même substitué pour répondre à la demande. Un élan de générosité à saluer certes, mais dont on ne peut se satisfaire car il pallie l’absence de la ville sur ses prérogatives.

– Absence de mise en œuvre du dispositif logement tremplin pour les professionnels de santé,

– faible connaissance du dispositif proposé par l’AP HP et peu de travail d’information

– et peu de prise en compte du caractère de professionnels au service de la ville, autant de raison qui expliquent les difficultés pour les professionnels de se loger.

Par le vœu que nous déposons aujourd’hui, nous souhaitons y remédier. Il n’est pas acceptable que ceux qui prennent soin de notre santé ne puissent pas se loger à Paris et la Ville doit prendre sa part.

3-Ne pas obérer la suite

La crise sanitaire ne peut se doubler d’une crise sociale

Ces 9 dernières semaines ont vu se creuser dramatiquement les inégalités. L’action de la ville en la matière reste limitée, or des leviers sont disponibles, notamment à l’égard des locataires du parc social ou pour lutter contre la fracture numérique en équipant les familles les plus précaires.

L’urgence est de renforcer l’adaptation de la ville aux crises 

La crise a révélé des sujets structurels d’inadaptation de la ville à certains enjeux. Je pense ainsi à l’accès à l’eau, nécessaire en période de pandémie comme de canicule. Équiper l’espace public en gel hydro alcoolique est nécessaire, mais n’est pas suffisant et il convient d’urgence d’avancer sur de nouveaux modes d’accès à l’eau dans l’espace public.

La gestion de crise doit intégrer les enjeux environnementaux

L’urgence climatique ne peut être sacrifiée.

Les dispositifs de relances ne peuvent s’exonérer d’objectifs en matière de développement durable. Comme cela se fait au niveau national, les aides doivent être assorties d’objectifs en matière environnementale.

Il vous revient également dès aujourd’hui de concilier des objectifs parfois contradictoires entre sécurité sanitaire et développement durable. Il faut agir dès aujourd’hui sur la question du tri et apporter des réponses face à l’explosion des emballages et du plastique et les équipements de protection à usage unique.

C’est aussi cela l’urgence.

Je vous remercie.