Madame la Maire,

Chers collègues,

Nous examinons cet après-midi les orientations du projet d’aménagement de développement durable, qui servira d’orientation politique à l’élaboration du futur PLU bioclimatique. Ce PADD défend donc, je cite, « un Paris inclusif, productif, résilient et décarboné, vertueux et préservé, permettant à Paris de répondre aux enjeux du nouveau régime climatique ».

Comment ne pas être d’accord avec cet objectif. Bien évidemment nous devons tout mettre en œuvre pour que notre Ville soit en mesure d’affronter à l’avenir les étés caniculaires, les pluies torrentielles et les crues.

Permettre aux Parisiennes et aux Parisiens de bénéficier des îlots de fraicheur doit être notre boussole dans la conception du futur PLU bioclimatique. C’est d’autant plus nécessaire que Paris s’éloigne de la trajectoire des Accords de Paris. Et ceci passe par le maintien le développement de la nature en ville.

Cependant, ce PADD ne tient pas compte des constats et des solutions qui semblent pourtant évidents pour beaucoup de Parisiennes et de Parisiens :

–        Les espaces de nature existant à Paris qu’ils soient des arbres remarquables, d’alignement, des espaces verts, des espaces de nature doivent être protégés et classés par ce nouveau PLU.

–        La préservation d’une réelle diversité d’espaces et de milieux est un préalable fondamental à toute politique prétendant œuvrer en matière de biodiversité, car Paris est l’une des villes les plus pauvres en Europe en m2 d’espaces verts par habitant. Paris est une ville dense et particulièrement artificialisée.

Il y a dans cette présentation des ambiguïtés évidentes :

–        La contradiction entre le discours de la Mairie sur la biodiversité à Paris et la réalité d’une action « cosmétique » qui « habille de vert » des projets d’urbanisation.

–        L’appel à des techniques de végétalisation artificielle qui ne sont pas une alternative équivalente à la préservation de véritables espaces de nature à Paris et de reconstruction de la nature là où cela est possible.

–        La contradiction entre les appels à projet pour créer de nouveaux sites de biodiversité et la destruction d’espaces “naturels” comme les serres d’Auteuil, les bassins de Grenelle, la densification de la cité Universitaire, la ZAC Bercy Charenton, les aménagements de Paris Nord Est, la destruction à la Porte Maillot du jardin Alexandre Soljenitsyne pour le remplacer par un immense cube de béton et toutes les constructions sur les jardins et cours en cœur d’îlots…

Comment peut-on à la fois présenter ce PADD et s’entêter sur la Tour Triangle ? Débattre de ce PADD et proposer le projet Tour Eiffel Champs de Mars ?

Il y a là une ambiguïté dont vous ne sortez pas.

Sur le périmètre et la méthode je m’associerai aux propos de mon collègue Jean-Pierre Lecoq simplement pour ajouter des remerciements à l’égard du premier adjoint sur son souci de bien veiller à associer tous les groupes politiques ; même si encore une fois sur le sujet de la méthode de concertation avec les citoyens nous rejoignons les critiques qui ont d’ores et déjà été émises.

Sur le périmètre même chose, Paris est une des villes les plus denses au monde. Plus de 1,8 millions de personnes y travaillent tous les jours sans parler des millions de touristes. Alors comment imaginer un PLU parisiano-centrée alors qu’il nous faut au contraire agir en responsabilité. Car en environnement ce qui compte avant tout ce sont les eco-systèmes.

Or, Paris ne peut plus se permettre d’engager des changements urbains de cette ampleur sans concerter les villes avoisinantes, au risque sinon d’omettre dans sa conception les enjeux métropolitains qui y sont liés. Je pense principalement aux questions de mobilité, à la nécessité de se doter d’un plan de circulation et je pense principalement à la nécessité de concerter la fameuse ZTL que ce PADD nous annonce courant 2022.

Un PLU parisien accentuera les disparités entre les territoires, comme l’illustrait la proposition de la conférence citoyenne de reléguer les constructions de tours aux portes de Paris, délégant le sujet de la densification, de l’obstruction du paysage et de la consommation énergétique du bâti aux arrondissements les plus excentrés ou aux communes hors périphérique.

Deuxième sujet, il manque énormément de choses dans ce document. On ne parle pas de l’esthétique urbaine parisienne, on ne parle pas de tours, on ne parle pas de densification, de surélévation et de dents creuses.

Repenser les principes de l’urbanisme et ses matériaux est pourtant indispensable pour la maitrise de l’empreinte écologique de la Ville, la nécessité de concevoir une Ville moins consommatrice en énergie.

Finalement ce document n’est que l’illustration d’un débat non tranché au sein de votre majorité entre construction de logements et préservation des espaces de respiration. Et in fine on ne sort pas de l’ambiguïté que vous entretenez depuis le début de la mandature faute d’accords politiques sur ce sujet et sur lesquelles achoppent les grands projets. Comment concilier plus de constructions et plus de natures à Paris.

Je voudrais m’arrêter un moment sur la question sur la question de la végétalisation : la végétalisation a une face cachée – celle de gonfler de façon artificielle les plantations les plus utiles parmi lesquelles la diminution de pleine terre dans les nouvelles parcelles construites ou reconstruites.

Qu’il s’agisse de contribuer à l’atténuation du changement climatique en stockant le carbone ou de s’adapter à ses effets (en rafraîchissant la ville lors des canicules ou en captant l’excès de ruissellement lors des pluies d’orage), la végétalisation tient une place prépondérante dans notre Ville de demain.

Certaines stratégies urbaines affichent ailleurs sous forme de slogan, une préoccupation particulière pour l’un des effets du changement climatique, par exemple la gestion du ruissellement et des inondations.

Toutes reposent en pratique sur un même triptyque :

–        Maintien d’un sol vivant,

–        Accroissement du couvert végétal

–        Rétablissement de la circulation naturelle de l’eau.

Une ville-éponge est plus rafraîchissante, grâce à l’évapotranspiration végétale, et les couloirs végétaux de la ville-fraîcheur lui permettent de mieux stocker l’eau. Ces approches présentent des bénéfices connexes (épuration de l’eau et de l’air, biodiversité…) d’autant plus importants que les espaces sont gérés écologiquement et sont reliés entre eux par une « trame verte et bleue », et ce à toutes les échelles ! L’approche minérale de la rénovation parisienne de Nation à République en est absolument le contre-exemple.

Au-delà des slogans il nous faut donc agir.

➢ Il faut cesser de détruire les espaces naturels existants.

➢ Consolider une véritable trame verte et bleue en articulation avec le Grand Paris et la Région Ile de France.

➢ Créer un véritable réseau de zones humides dans Paris.

➢ Inscrire dans le PLU tout espace non bâti comme espace non constructible.

➢ Recenser tous les espaces de nature avec des aménagements appropriés, en lien avec des associations et les habitants des quartiers concernées.

Madame la Maire, ce PADD est davantage l’éloge d’une politique que vous ne menez pas et que vous n’avez jamais mené, plutôt que de solides orientations politiques nous permettant de donner aux Parisiennes et aux Parisiens la possibilité d’être protégés face aux hausses déjà prévues des températures. Paris et les Parisiens étouffent. Il y a urgence.

Ce n’est pas du « en même temps » dont nous avons besoin, ce n’est pas la schizophrénie dont vous faites preuve, c’est d’un réel volontarisme.

Je vous remercie.