Monsieur le Maire,

Mes chers collègues,

Nous nous trouvons aujourd’hui à un carrefour critique de notre histoire urbaine. La végétalisation n’est pas juste un projet écologique. C’est une nécessité impérieuse. Une question de santé publique et de justice sociale.

En tant que rapporteure de la mission d’information et d’évaluation « Paris à 50°C », présidée par mon collègue Alexandre Florentin, nous avions posé ces constats, ceux que notre capitale devait faire face à des défis sans précédent liés au réchauffement climatique. Les îlots de chaleur urbains ne sont pas simplement une question d’inconfort, c’est un risque pour la santé extrêmement grave, notamment pour les citoyens les plus vulnérables. C’est pourquoi la stratégie de végétalisation a la plus grande importance. Comme le souligne le rapport de la Chambre régionale des comptes, des ajustements significatifs doivent être envisagés pour optimiser notre réponse à ces enjeux.

Premièrement, il est crucial que ces actions ne soient pas simplement des déclarations d’intentions. Nous devons garantir une exécution rigoureuse et suivie des projets de végétalisation. Pour cela, il est nécessaire d’avoir à la fois un cadre clair, des objectifs mesurables, des indicateurs. La végétalisation de 170 000 arbres d’ici 2026 est un objectif ambitieux, mais sa réalisation doit être mieux suivie et doit permettre également aux citoyens, aux Parisiens de suivre la progression des projets, leurs impact environnemental en garantissant que chaque arbre planté contribue à l’amélioration du cadre de vie et soit durable malgré les effets du réchauffement climatique. Malgré cet engagement ambitieux, la protection du système racinaire des arbres reste aujourd’hui insuffisante pour protéger dans la durée et pleinement les arbres qui seront matures demain. 

Deuxièmement, la distribution inégale de la végétalisation dans nos arrondissements doit être corrigée et des actions doivent être menées de façon prioritaire dans les quartiers qui souffrent d’un déficit de nature, alors que les bénéfices d’espaces verts sur la santé mentale et physique sont largement documentés. Chaque quartier, chaque arrondissement doit bénéficier de politiques de végétalisation voir bénéficier d’un rééquilibrage, assurant une justice environnementale pour tous. Il convient de planifier davantage de végétalisation dans l’espace public et de façon plus dense en cohérence avec les espaces existants. Si la création de nouveaux parcs est une nécessité dans certains quartiers, sa mise en réseau, des grands parcs et des grands bois vers le centre de Paris, la continuité paysagère, la mise en place de parcs présents et futurs sont un impératif pour garantir à la fois les corridors biologiques et le rafraîchissement à moyen terme.

Troisième chose et troisièmement, la mise en œuvre de la végétalisation doit être adaptée aux spécificités parisiennes. Nous ne pouvons pas nous permettre de généraliser des solutions qui ne tiennent pas compte de la complexité de notre urbanisme et aussi de nos sous-sols dont les méthodes d’entretien sont inadaptées et ne permettent pas de résister en fonction des moyens investis, au changement climatique et qui ne permettent pas de protéger la biodiversité urbaine. Si la mise en place de la récente charte de l’arbre et du guide des essences permet une meilleure planification, rappelant que la temporalité des jardins n’est plus vouée à être celle de l’éphémère, celle du printemps et de l’été, il ne s’agit pas plus que de réintégrer la nature en ville, il s’agit plus que d’esthétiser l’urbain, il faut protéger l’environnement dans nos territoires. 

Nous sommes conscients que Paris doit composer avec un certain nombre de contraintes, notamment la question réglementaire, la question des sous-sols que j’ai pu évoquer, cela nous oblige à être ambitieux et à trouver d’autres solutions. 

La Ville doit continuer également à porter des projets, mais également à renoncer à des projets qui vont à contresens de la préservation des espaces verts et cela nous oblige à sanctuariser les espaces verts existants, de façon définitive, mais également sanctuariser des espaces vides pour en faire demain des réservoirs de biodiversité.

Quatrièmement, comme souligné par la CRC, le rôle de la DEVE (direction des espaces verts et de l’environnement) qui est fondamental et doit être renforcé. La baisse des effectifs, la baisse des moyens sont préoccupants et doit être inversée pour assurer la pérennité de notre engagement envers la végétalisation. C’est un personnel bien formé, suffisant qui permettra de développer nos espaces verts et de les maintenir en bon état de conservation.

Cinquièmement, nous sommes également confrontés à une instabilité financière dans les investissements dédiés à la végétalisation. Après le pic en 2019, les dépenses ont diminué, mettant en péril la possibilité de réalisation d’un certain nombre d’objectifs. Cette soutenabilité financière de nos politiques exige une révision de notre modèle économique urbain en plaçant les espaces verts, la nature et l’environnement avant certains projets d’aménagement.

Enfin et peut-être de façon plus cruciale, le rapport indique qu’il faut tirer un bilan des actions menées dans la mesure où les documents de bilans annuels des plans manquent de mesures fiables et détaillées. Les plans sectoriels ne sont pas dotés de moyens financiers dédiés. La trajectoire des dépenses est insuffisante et incertaine. Des outils de suivi sont nécessaires comme ceux que porte la France sur le plan international pour avoir des bilans à mi-parcours du plan climat, du plan climat annuel, du “bleu climat”, pour intégrer ces données financières et calendaires et les détailler pour permettre un véritable pilotage des initiatives environnementales. 

Je vous remercie.