Madame la Maire, 

Vous l’avez dit, l’urgence de la situation dans le nord-est parisien est réelle. 

Comment peut-on accepter ce qui se passe ? Pour les riverains, pour les consommateurs de crack, nous ne pouvons rester les bras ballants, car depuis bien trop  longtemps, ce sont, chaque jour, près de 700 consommateurs de crack qui prennent possession des lieux de vie des habitants du nord-est parisien, qui désespèrent.

J’ai ainsi reçu des témoignages de résidents autour du jardin d’Eole qui ont tenté d’alerter la mairie du 18e qui, me disent-ils, répond par un mail institutionnel, ouvrez les guillemets : “elle ne répond plus quand on lui demande des précisions”.  

Quant à la mairie de Paris, nos demandes restent sans réponse.

Ils ajoutent, j’ouvre les guillemets, “on fait des manifestations tous les mercredi soir pour dénoncer cette situation infernale. On ne sait pas quand le jardin sera évacué, personne ne répond à nos mails.”

Alors certes, depuis l’évacuation a eu lieu sans que le problème n’ait trouvé de solution et nous ne devons donc pas nous en satisfaire, nous en avons tous conscience.

Les problématiques liées au crack sont nombreuses. Les risques sanitaires sont très élevés. Les consommateurs de drogues vivent dans des lieux insalubres et bénéficient de peu de suivi médical, ni physique, ni psychologique. 

Sur le plan social, l’usage des drogues entraîne une augmentation de la précarité de la délinquance et crée un fossé entre la population et les consommateurs de drogues qui sont en marge de la société.

L’insécurité persiste et les riverains souffrent quotidiennement de cette situation. En témoignent les altercations parfois violentes entre usagers de crack eux-mêmes ou la population riveraine.

Quant aux violences faites aux femmes,  elles sont malheureusement toujours plus nombreuses.

Rien que depuis le début de l’année, si j’ai bien compris, 63 faits de violence sexuelle envers des femmes ont été recensés dans le 19e arrondissement. Et la presse relate chaque jour les usagers de crack violer ou pousser à se prostituer pour survivre. C’est, d’après les associations, le cas pour 95 % d’entre elles.

Pour répondre à toutes ces problématiques, il est évidemment nécessaire d’avoir des moyens financiers pour mettre en place un certain nombre d’actions. Mais cela

ne suffit pas. Je fais bien évidemment référence aux 9 millions d’euros du plan crack 2019-2021.

Mais un investissement aussi coûteux pour quel résultat ? Nous nous posons la question, nous aimerions savoir. D’autant que cette enveloppe a manifestement été utilisée principalement pour héberger les usagers du crack en journée, pas pour les accompagner vers la sortie de la drogue.

Or, la mobilisation de moyens humains est primordiale pour assurer une inclusion maximale des consommateurs à travers des parcours de soins approfondis et spécialisés.

En moyenne, ce sont 30 % des usagers de drogues qui ne présentent ni couverture maladie ni suivi social ou médical.

Une attention particulière doit également être portée au suivi psychologique et psychiatrique. Nous le savons tous, un accompagnement sur le long terme est nécessaire pour espérer peut être une rupture totale avec le crack qui, rappelons-le, ne dispose d’aucun substitut.

J’ai un 3ème point, celui de la localisation géographique des usagers de crack. Madame la Maire, vous avez appelé à la libération du jardin d’Eole mais la délocalisation du problème n’entraîne pas sa résolution et vous l’avez bien dit, ainsi que Monsieur le Préfet, d’autant plus que les quartiers évoqués par une éventuelle relocalisation, Bercy, Charenton ou Poissonnier, seront transformés dans les prochaines années, rendant une nouvelle fois cette situation temporaire. 

Signe que la perspective d’une relocalisation fixe doit être pensée pour les usagers du crack.

Une concertation devra nécessairement avoir lieu tant avec les élus qu’avec les riverains. Vous l’avez dit, nous en prenons acte et attendons de pouvoir y participer, Madame la Maire.

Enfin, le maillage territorial des salles de consommation à moindre  risque doit être réfléchi et discuté. Les élus MoDem du Conseil de Paris soutiennent depuis longtemps le principe de salle de consommation à moindre risque, mais Paris n’a pas, seule vocation est vous l’avez dit aussi, d’accueillir et de résoudre la problématique des usagers de crack dans l’espace public.

C’est par la présence de plusieurs salles de consommation à moindre risque sur l’ensemble du territoire métropolitain et par une prise en charge dimensionnée et adaptée que nous pourrons apporter collectivement, État, collectivités, ARS, une réponse aux problématiques multiples et imbriquées du crack.

Ainsi, nous sommes d’accord, nous ne pourrons nous passer de la mobilisation de tous les acteurs pour qu’ils résolvent ensemble ce problème très difficile : sécurité, santé, accueil.

Il n’y a qu’en travaillant ensemble, avec une volonté forte et partagée de tous les acteurs, que nous y parviendrons.

Je vous remercie.